Nos Renc’Arts : un photographe présente un autre photographe, à la cafétéria du théâtre Le Moderne. Sous forme de table ronde avec l’artiste, un dimanche par mois, agrémenté d’un apéritif original.
Rencontre artistique et photographique avec Éric Van den Berg qui sera présenté par les photographes Jean Janssis et Jef Goffart
[marron]Dimanche 10 juin de 10 à 13 heures
A la Galerie Photographique Ouverture - Théâtre Le Moderne
1 rue Ste Walburge - 4000 Liège
Apéro original : le giroflé
Aux cimaises : " Gens de la Corne de l’Afrique", photographies de Dominique Gillardin et André Leclercq
Ouvert à tous. Entrée libre.[/marron]
Graphiste, photographe et psychopédagogue de formations, Éric Van den Berg exerce depuis 1990 diverses fonctions dans l’enseignement supérieur artistique.
Sa pratique photographique est centrée sur ce qui fait et ce qu’est la photo aujourd’hui.
Comme la plupart de ses contemporains, il est un boulimique du déclenchement, Joan Fontcuberta parle d’ailleurs en ces termes de l’ « homo photographicus » : « Celui qui prend des photos partout et tout le temps […] nous sommes obsédés par l’image, pour le plaisir, pour communiquer, pour nous documenter, construire notre identité… ».
Á partir de cette façon de photographier, désaliéné de la technique, les questions « post-photographiques » sont ainsi posées au travers d’une démarche plastique : le rapport au temps, à l’espace, aux sujets, aux supports, le regard posé de loin ou de près, l’utilisation du numérique, les questions de la « bonne photo », celles liées au hasard ou à l’accident, à l’image prise avec son boîtier à celles prises sur l’internet en passant par des expériences photogrammiques et photochimiques.
Ce qui l’intéresse surtout, au-delà du plaisir pris à prendre des photos et à les monter en images, c’est le rapport qu’entretiennent les spectateurs avec ses images : de celui qui regarde de loin le tableau à celui qui veut maîtriser le détail lequel comprendra l’accident, y verra du hasard, démasquera les supercheries, y trouvera une note d’humour, de poésie ou, qui sait un message caché ?...
La loi des séries et l’ordre des choses
Reprendre le fil de mes idées.
M’attacher au fil d’Ariane, éperdument me perdre en quête de sens.
Prendre la direction, la voie tracée, la route à suivre, linéaire, littérale mais pas que ! M’aligner sur la suite algébrique, chiffrée, datée, vorace d’événements casuels et fortuits. Hasard, chance ou nécessité ?
Embarquement immédiat.
Être conduit sur des autoroutes d’images et des bandes d’arrêt d’urgence. Il y a des césures, des rythmes, des mouvements oculaires en lien avec la lecture, et qui déterminent le mode de décodage.
Il y a des allures de planches contacts, de films, quand les images se touchent sans séparation ni frontières. Ou quand elles font la file, attendent leur tour et distillent le goutte à goutte des clepsydres.
Grains de sel ou grains de sable de nos vies.
Dire le pixel, la ponctuation, la phrase, le roman. Point à la ligne.
J’ai vu, j’ai lu, j’ai dévoré les images d’Éric Van Den Berg comme autant de pages d’un nouveau roman d’Alain Robbe-Grillet ou de Claude Simon. Elles sont aussi littéraires. Passage pour piétons et déroutant nuages.
Plus tard, des images viendront rompre la linéarité, en organisant le volume, des suspensions, des flottaisons.
Et des images venues d’ailleurs, du lointain internet, pour trouver leur place dans une autre géométrie.
Fractales.
J’ai vu des avions, comme des insectes bourdonnant, remplir le ciel.
J’ai nagé parmi les naïades.
C’est aussi l’histoire d’une machine, d’une tour qui abrite dans l’arborescence des data, des dossiers, toutes nos photographies. Par milliers. Et d’un homme. L’opérateur aux manettes, usant de son pouvoir de décision, dans sa toute puissance, procède au choix de ne rien éliminer. Tout dire, tout montrer. Ouvrir les vannes d’un flot continu d’images. Ni juge, ni arbitre. Seul retentit le coup de feu du départ et le clap de fin.
Abandon du prédicat esthétique, refus des jugements de valeurs et des priorités. L’enjeu est majeur, il relève de la politique et de la philosophie. Le travail d’Éric van Den Berg questionne notre rapport au pouvoir de création artistique et nous interroge sur notre place, notre rôle, à l’heure, à l’ère du numérique et des modifications profondes et définitives qu’il opère. Autre vision, autre et nouvelle organisation du monde.